C’était à la faveur d’une conférence-débat organisée vendredi dernier, 8 septembre 2023 à l’Hôtel Prodige par Mfou, dans la Mefou et Afamba par le Réseau des Journalistes pour l’Application du Plan d’Action de Maputo (JNMAP) avec l’appui de Pulitzer Center. L’évènement avait pour cible les jeunes de 25 à 45 ans, de profils et de carrières professionnelles divers avec pour objectif principal les impliquer dans la lutte contre les hafres de l’exploitation forestière illégale au Cameroun. Pendant plus de 3 heures, des experts dans les différents segments de la foresterie à l’instar de Ghislain FOMOU, Declermond ATEBA LOGO ou encore Madeleine NGUENGANG ont travaillé à convaincre l’assistance de l’urgence de s’intéresser à la question de la perte des ressources forestières qui au final, et contrairement à ce qu’on peut penser, a un impacte négatif sur toutes les couches sociales.
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“L’illégalité dans la chaîne d’approvisionnement du bois au Cameroun” tel était le thème de cette conférence débat qui a rassemblé une soixantaine de jeunes dans la salle de conférence de l’hôtel Prodige, par Mfou, vendredi dernier, 8 septembre 2023. Une initiative du JNMAP ( Journalists Network for Maputo’s Action Planning), le réseau des journalistes pour l’application du plan d’action de Maputo avec le soutien du Pulitzer Center.
Prenant la parole à l’ouverture de ces échanges, Adrienne ENGONO MOUSSANG, la Présidente du JNMAP a commencé par rappeler la pertinence du choix de cette cible de jeunes professionnels venus d’horizons divers. Pour elle, la jeunesse étant le “fer de lance de la nation” et par ricochet, le socle de la construction et du développement d’un pays comme le notre, elle doit désormais et plus que par le passé être impliquée dans la réflexion sur toutes les questions de développement et plus singulièrement les questions liées à la gestion des ressources forestières, l’un des secteurs sur lesquels repose l’économie du Cameroun . C’est donc une nouvelle approche qu’a choisit d’explorer la JNMAP, celle de débattre des thématiques de l’heure avec des jeunes qui dans leur quotidien, ont d’autres centres d’intérêts. Au final, l’espoir des organisateurs est que ces jeunes ainsi édifiés, assurent le relais communicationnel autour d’eux, via les réseaux sociaux par exemple, WhatsApp, twitter, Facebook et autres . Ceux-ci vont certainement porter le message auprès de leur différents publics via leurs images et leurs publications. Et à partir des 60 présents, des milliers d’autres peuvent être touchés et impactés. Au vu de tout ce qui précède, les jeunes sont donc une force sur laquelle il faut compter.
LES JEUNES CAMEROUNAIS(E)S NE VIVENT PAS EN VASE CLOS
En effet, comme l’a rappelé Madame La Présidente Adrienne ENGONO MOUSSANG, les jeunes camerounais(e)s ne vivent pas en vase clos. Comme partout sur la planète, ce sont eux , les jeunes, qui se déploient dans le cyber espace et qui utilisent pour le mieux les TIC. Tout ce qu’on fait de nos jours sur la toile a un impact, et sans être des acteurs en première ligne de ce combat contre l’illégalité dans l’exploitation forestière, les jeunes peuvent à leur manière être des lanceurs d’alerte , des influenceurs ou encore des leadeurs d’opinion sur des attitudes ou des gestes qu’ils auraient remarqué. Ils peuvent très bien être des sources d’informations pour les journalistes qui enquêtent sur ces questions et autres acteurs soucieux de la bonne gestion de nos ressources forestières même dans un secteur aussi technique et complexe que la foresterie.

Parlant de chiffres, une étude réalisée par le CIFOR (2020) et conduite par la Facilitation du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (PFBC) de concert avec la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) et les administrations forestières des pays membres révèle que la contribution du secteur forêt faune dans l’économie sociale du Cameroun est de 4 % du PIB hors pétrole. La valeur brute de ces bénéfices économiques de ce domaine d’activités est estimée autour de 150 milliards de francs par an . Un secteur qui a créé près de 22 722 emplois permanent direct donc 21 902 emplois dans la filière bois-d ‘œuvre industrielle et 802 emplois liés à la chasse sportive. De plus le secteur forêt faune contribue aux recettes publiques pour un montant total de 64,2 milliards de francs CFA dont 27,8 milliards au titre de la fiscalité spécifique et 36,4 milliards pour la fiscalité générale liée à l’exploitation et la transformation du bois , à l’activité de chasse et à la filière des PFNL.
Toutefois ces chiffres évoqués avec enthousiasme plus haut et qui renseignent à suffisance sur l’intérêt qu’on doit porter à la foresterie comme source de richesses pour le développement du Cameroun sont malheureusement compromis par les pratiques illicites longtemps décriées dans ce secteur .En effet comme l’a expliqué Declermond ATEBA LOGO, Expert en Foresterie Tropicale à l’assistance durant son exposé , et selon l’ ANIF (2021) qu’il cite, l’exploitation illégale des forêts et de la faune a fait perdre 33 milliards de francs CFA au Cameroun soit 50,3 millions d’Euros. Pour couronner le tout d’ après l’Agence France Presse, les pays africains perdent chaque année 17 milliards de dollars à cause de l’exploitation forestière illégale. Et c’est dans l’optique d’impliquer les jeunes professionnels dans ce combat que cette conférence débat a donc été organisée.

ÇA BOUGEAIT DANS LA SALLE ET LES JEUNES ONT DÉMONTRÉ LEUR INTÉRÊT POUR LA CHOSE
Au finish, c’est un sentiment de satisfaction de la part des organisateurs qui s’est dégagé au sortir de cette conférence débat tenu sous la forme des questions-réponses. Ça bougeait dans la salle et les jeunes ont démontré leur intérêt pour la chose. Au-delà de servir de relais communicationnel l’espoir est que ces jeunes, moins nombreux quand même que ceux attendus, s’intéressent davantage au secteur forestier et aux opportunités qui leurs sont offertes en termes d’activités génératrices de revenus. C’est pourquoi ces experts sont abondamment revenus sur les opportunités d’affaire dans l’exploitation des produits forestiers non ligneux ( PFNL) à l’instar de la commercialisation du garcinia cola ( bitter cola dans le commerce) la cola acuminata( la cola) la coula edulis ( les noisettes) le ricinodendron heudelotii( le ndjangsang) ou encore le rotin, les vers blancs, les chenilles, les criquets, les champignons ou le miel.
En rappel, cette conférence débat a été organisée par le JNMAP en collaboration avec le Pulitzer Center . Le Réseau des Journalistes pour l’Application du Plan de Maputo a pour but de promouvoir les actions visant l’amélioration de la santé maternelle et infantile au Cameroun d’une part et la promotion du développement durable via les ODD d’autre part. C’est un mouvement qui rassemble actuellement plus de 30 journalistes sur l’ensemble du triangle national.
Il est appuyé dans ses actions par le Pulitzer Center on Crisis Reporting qui lui est une ONG américaine basée à Washington DC qui sensibilise l’opinion publique sur les changements climatiques et les problèmes auxquels sont confrontés les forêts tropicales dans les régions de l’Amazonie, l’Asie du Sud-Est, mais aussi le Bassin du Congo.
Le projet ” The Congo Bassin Talks with Young Professionals” sur lequel était adossé cette causerie éducative consiste en l’utilisation des plateformes d’échange des jeunes afin de les sensibiliser sur les causes et les solutions à la déforestation . Le Pulitzer Center qui donc un projet d’éducation des jeunes sur la vie environnementale a donc décidé de venir au Cameroun et de travailler avec le JNMAP pour que cette thématique soit débattue avec les jeunes Camerounais. Dans son plan d’action, l’ONG américaine accompagne les reportages des journalistes sur les questions environnementales dans les pays du bassin du Congo. Et comme nous l’ont rappelé les responsables de JNMAP à l’entame des échanges, c’est l’enquête réalisée par Madeleine NGEUNGA et Josiane KOUAGHEU pour InfoCongo et Le Monde sur la manière dont le bois illégal échappe aux postes de contrôle au Cameroun et qui a démontré que l’exploitation forestière illégale est un fléau pour l’économie du pays des Lions Indomptables qui a servi de prétexte pour cette conférence.
REACTIONS
ADRIENNE ENGONO MOUSSANG – JOURNALISTE – PRESIDENTE DU JNMAP

Il faut que vous(les jeunes) soyez au courant des réalités de votre pays, parlant de l’exploitation forestière. C’est la raison pour laquelle nous avons fait venir ces experts. N’allez pas dire qu’on est venu crucifier le gouvernement. On a cherché quelqu’un pour équilibrer le panel mais comme on s’y est pris tard, on a pas eu d’interlocuteur de ce côté là. On a eu une soixantaine de participants et je suis assez satisfaite du déroulement des travaux. Au lieu de se positionner dans l’attitude stérile du spectateur, les jeunes du Cameroun peuvent se mettre en groupe, créer de petites structures pour évoluer dans le domaine forestier et s’en sortir, devenir même des employeurs.
GHISLAIN FOMOU – EXPERT FORESTIER – CONSULTANT EN GOUVERNANCE FORESTIERE

Il faudrait que ce soit le citoyen qui pose aujourd’hui ce problème. Il faut sortir du cadre formel des experts et des acteurs qui interviennent dans le secteur forestier pour élargir la réflexion à tout citoyen, à tous les consommateurs des produits forestiers de s’intéresser à ce problème parce qu’à la fin, c’est nous tous qui subissons les conséquences de la perte des ressources forestières. Il est important aujourd’hui d’agir de manière stratégique pour mobiliser les masses à être informées , sensibilisées et développer en elles une sensibilité sur ce sujet.
L’enjeu qu’il y’a derrière cette préoccupation c’est un enjeu de justice sociale parce que le fait d’être légal permet à chacun de trouver son intérêt dans l’activité.
Ce que ça fait…ça fait !